Ethelreda "Red" Mordread

Lorsque le dragon se posa dans la clairière, Ethelreda se serra contre son oncle. Il l'aida à grimper sur son dos, et installa ses deux valises de belle maroquinerie neuve sur les dragonnets.

Visiblement Red ne se sentait pas à l'aise. Elle s'agrippait à la selle avec tant de force, que les jointures de ses doigts en pâlissaient. Elle imprima un baiser dans la joue rugueuse du vieil homme et lui dit :

"- Tu m'écriras ?

- Mais bien sûr, ma mignonne... Ne t'inquiète pas... "

Lui aussi semblait très ému.

"- Allez, il est l'heure. Fait bon voyage."

Les mots de Red restèrent coincés dans sa gorge. Elle fit un petit signe d'adieu et le dragon déploya ses ailes. Alors qu'il s'élevait, elle poussa un petit cri et s'aplatit sur la selle, les yeux fermés.

*Ne pas regarder ! Ne pas regarder !* se répétait elle dans sa tête. Le vent, le froid, la paralysèrent sur sa selle. Tout à coup, elle sentit une brusque embardée. Elle ouvrit les yeux malgré elle et vit une ombre glisser dans les nuages. Le dragon piqua droit dessus. Un bruit de forge emplit l'air autour d'elle, ainsi qu'une odeur de souffre, et le dragon cracha du feu sur l'ombre qui revennait. Elle hurla et se recroquevilla du mieux qu'elle put. Deux embardées plus tard, le dragon reprennait sa course, mais zigzaguait, comme pour ne pas être suivit.

Enfin, elle sentit qu'il descendait. Elle se redressa un peu, et lorsque les puissantes pattes touchèrent le sol, elle se laissa tomber à terre. Ses jambes tremblaient. Elle chercha un instant sa respiration et regarda la bête s'éloigner. Ses valises tombèrent à terre, elles aussi, lachées par les dragonnets. Ils disparurent à leur tour.

Elle se laissa le temps de reprendre un semblant de controle sur elle-même et se releva. Alors, elle admira bouche bée, le dragoport. Machinalement, elle epousseta sa jupe longue et brune, complètement absorbée par sa contemplation. Elle n'entendit pas qu'on s'approchait.

Perdue dans ses pensées, Red frémit en entendant la voix de Marc. Elle posa ses yeux noirs sur lui, sans comprendre, puis ses lèvres se pincèrent dans un mouvement de détermination.

*Ne te laisse pas impressionner !*, se réprimanda t-elle.

Elle le regarda un instant chercher son nom dans ses affaires. Puis d'une voix sûre et sans enthousiasme, elle dit :

"- Appelle moi Red."

Elle se contenta ensuite d'opiner de la tête, les yeux attirés par l'architecture merveilleuse du Dragoport. Elle les posa ensuite sur ses valises, s'approcha d'elles, les redressa, passa le doigt sur une égratignure dans le cuir neuf,

*Z'auraient put faire attention ! Maudites bestioles !*

puis se tint prête à partir. Le regard à nouveau perdu dans le paysage.

A la question - sur l'itinéraire à prendre - de Marc, elle répondit de sa voix posée, et très rapidement en fixant au loin les premières frondaisons de la forêt.

"- Allons par la forêt."

* Il y fera sûrement plus frais qu'ici...*

Ils empruntèrent donc le chemin qui y menait. Red était encore plongée dans ses pensées...

*Tout est nouveau ici... Je me sens vraiment pas à l'aise ! Il faut que j'en sache plus !*

Sa jupe brune, très longue, d'une matière soyeuse, vint claquer doucement à ses chevilles, enfermées dans de très fine botines noires. Elle était large et ne génait en rien sa marche. Red etait grande. Elle suivit donc Marc sans le moindre effort jusqu'à l'orée du bois. Arrivée là, elle dit de manière assez maladroite, comme si elle cherchait ses mots :

"- Est ce que.. Comment sont les autres élèves ? Je veux dire de notre maison... "

(Et merci, au fait, pour le sacrifice que tu as fait pour venir me chercher... C'est gentil.)

Red écouta la description des élèves de Terro qu'en fit Marc. Sa réponse n'était pas celle qu'elle attendait, mais elle la rassura quand même. Elle voulait savoir, en fait, s'il y avait des caïds parmi eux, des élèves qui faisaient leur loi, ou encore des bouc émissaires, des bizarres, des interessants, des élèves importants, etc... mais *bah*, se dit elle *je verrais bien!*.

Ce qui la rassura, c'est que les autres élèves semblaient partager sa passion pour la nature... *Bien! Au moins j'y ai ma place!* Un sourire passa sur ses lèvres en pensant que pour une fois, elle ne dénoterait pas dans le paysage...

"Excuse moi... Je m'arrète un instant ! J'ai très chaud !"

En effet, elle portait un drôle de blouzon bouffant dans les rouge brique délavé, fermé jusqu'au cou. Elle ouvrit la fermeture éclair, laissant apparaître un T-Shirt trop grand pour elle, noir, avec en surimpression une grosse tête de loup-garou qui semblait manger le texte :"Werewolf in Wild West". En devinant le regard de Marc, ses pomettes très blanches rosirent un peu.

"C'est mon frêre André qui me l'a passé... Pour que je me sente plus courageuse..."

Elle coinça le blouzon dans l'anse d'une des valises, souffla, puis de but en blanc lui demanda :

"ça t'es venu comment ?"

Lorsque Marc raconta la découverte de ses pouvoirs, Red eut un mouvement de surprise amusée.

"- C'est amusant, dit elle. c'est venu de la même façon que toi ! C'était pour mes onze ans. J'ai reçu des poupées Mary'Lin. Tu sais, ces poupées à la mode. Toutes les filles de l'école en avaient au moins une, et moi j'en ai reçu trois d'un coup ! J'étais tellement contente, qu'elles se sont animées toutes seules... "

Réalisant soudain qu'elle avait beaucoup parlé, elle se tut d'un coup. Le grand T-shirt accentuait encore plus la délicatesse un peu trop maigre de ses bras. Elle perdit un instant de sa prestance, semblant très fragile tout à coup, et c'est d'une voix très douce qu'elle dit :

"- Tu sais Marc, ma famille est presque composée que de cracmols et de quelques moldus... "

*Pourvu que ce soit les bons termes... *

"- Tu as l'air gentil... Je... Est ce que tu m'aideras ? Je connais rien à ce monde... "

Elle baissa les yeux sur sa dernière phrase. Visiblement inquiète.

Lorsque Marc lui assura son aide, elle se repris très vite.
"-Merci" dit elle simplement.
Elle soupira et retrouva toute son allure volontaire.
De l'allure, elle en avait, et ce, malgrés ses vètements très larges. On aurait dit qu'en s'habillant ainsi, elle essayait de cacher quelque chose. Sûrement sa maigreur, ou sa taille.
A présent en confiance, elle souriait sans réserve au jeune garçon. Elle ramassa une nouvelle fois ses valises, puis attendit que Marc lui montre le chemin.

(Lien vers la forêt)